Le père de la biopiraterie moderne… Le déclin du caoutchouc au Brésil est lié au plus grand scandale de biopiraterie de l’histoire. 

« Avant l’OPEP, la biopiraterie de Wickham a donné à la Grande-Bretagne le premier monopole mondial sur une ressource stratégique dans l’histoire humaine. » Joe Jackson, LE VOLEUR DE LA FIN DU MONDE

« Des années plus tard, lorsque ses plans étaient en ruines, toutes les vies perdues et les amours brisés, il restait assis dans un fauteuil de son club à Londres avec tous les vieux impérialistes, exagérant le récit de sa seule victoire et la considérant justifiée. 

À ce moment-là, la légende de Henry Wickham devient iconique, et sa fraude au service de la reine et du pays faisait partie de l’histoire de l’Empire. » Joe Jackson, LE VOLEUR DE LA FIN DU MONDE

Au début du XXième siècle, Manaus était l’une des villes les plus riches du monde. 

Elle avait inauguré en 1896 le Teatro Amazonas, une merveille de l’architecture mondiale construite avec du marbre italien de Carrare, de la céramique émaillée importée d’Alsace, des lustres de Murano et une structure métallique anglaise, considérée comme la troisième plus grande attraction touristique et l’une des sept merveilles du Brésil.

On raconte que les magnats du caoutchouc allumaient leurs cigares avec des billets de cent dollars, que leurs femmes envoyaient leurs vêtements pour être lavés et repassés en Europe, et que leurs chevaux étanchaient leur soif avec du champagne français, un luxe permis par l’argent du caoutchouc utilisé dans le monde, dont 95 % provenait de l’Amazonie brésilienne.

Cependant, ce cycle n’a duré que quelques décennies, et dès 1920, le Brésil ne produisait plus que 3 % du latex mondial, plongeant la production de caoutchouc dans une crise qui a connu une récupération éphémère pendant la Seconde Guerre mondiale, mais qui perdure encore aujourd’hui. 

Le déclin du caoutchouc au Brésil est lié au plus grand scandale de biopiraterie de l’histoire : le vol des graines d’hévéas, orchestré par l’Angleterre.

Cet épisode pour les intérêts de l’industrie britannique, a réuni le gouvernement, ses institutions, des scientifiques anglais et participation spéciale d’un aventurier, Henry Wickham.

Henry Wickham, l’agent britannique auteur du plus grand vol du monde et père de la biopiraterie moderne.

Wickham fut l’agent chargé de collecter en Amazonie et d’emmener à Londres soixante-dix mille graines d’hévéa pour être plantées au Royal Botanic Gardens, le jardin botanique de Londres, puis transplantées ultérieurement dans les colonies britanniques d’Asie.

Bien que cette histoire soit connue depuis longtemps, elle est magistralement racontée dans le livre « Le Voleur de la fin du monde« , qui décrit comment l’Anglais a volé soixante-dix mille graines d’hévéa et mis fin au monopole du Brésil sur le caoutchouc, par le journaliste et écrivain nord-américain Joe Jackson.

Le livre de Jackson a été classé par la revue « Time » comme « l’une des plus grandes fables de l’ère moderne » et a reçu les éloges du « Washington Post » et du « Los Angeles Times« .

Peu après l’œuvre de Joe Jackson, l’historienne Emma Reisz, d’Oxford, a publié en Angleterre « The political economy of imperialism in the tropics: Rubber in the British Empire« , en montrant que le sujet est extrêmement important et actuel.

L’exploit de Henry Wickham n’était pas improvisé.

Il a demandé beaucoup de planification, la collaboration de figures comme Thomas Hancock, fondateur de l’industrie moderne du caoutchouc en Angleterre, le célèbre botaniste William Hooker, directeur du Jardin botanique de Londres, ainsi que le soutien diplomatique et le financement du gouvernement anglais.

En 1871, Wickham arriva à Santarém et prépara méticuleusement le vol, réalisé en 1876, lorsque les soixante-dix mille graines furent embarquées à destination de Londres, conditionnées dans des paniers appropriés commandés par Wickham aux habiles indigènes locaux.

Il est probable qu’il ait soudoyé la douane de Santarém pour faire passer sa précieuse cargaison.

Le père de la biopiraterie fut nommé Sir Henry Wickham, chevalier de l’Empire britannique, et sa mort a mérité un obituarium dans le Times de Londres.

La question qui se pose est : combien de Henry Wickham opèrent aujourd’hui en Amazonie, non plus en tant que simples aventuriers, mais déguisés dans des activités de diverses organisations non gouvernementales et financés par différents empires, mais avec les mêmes objectifs que leur illustre ancêtre ?…

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Quand la CIA manipule la pensée française : une guerre culturelle contre l’indépendance intellectuelle.

Introduction : Les intellectuels, cibles d’une guerre invisible.

Les intellectuels, souvent perçus comme des figures marginales, absorbées par des débats théoriques, sont en réalité des acteurs centraux dans les luttes pour l’influence culturelle et politique. 

La Central Intelligence Agency (CIA), consciente de ce pouvoir, a fait des penseurs français une cible prioritaire. 

Un document interne de 1985, déclassifié grâce à la loi sur la liberté d’information, intitulé “France : Defection of the Leftist Intellectuals”, révèle l’intérêt de l’agence pour des figures comme Michel Foucault, Jacques Lacan et Roland Barthes. 

Ce rapport expose une stratégie sophistiquée visant à manipuler les idées pour servir les intérêts géopolitiques des États-Unis, au détriment de la souveraineté intellectuelle française.

Le livre La CIA en France” de Frédéric Charpier complète cette analyse en détaillant six décennies d’ingérence américaine dans les affaires françaises, notamment à travers des opérations culturelles et médiatiques. 

Cet article explore comment la CIA a orchestré une guerre culturelle pour réorienter la pensée française, en affaiblissant les courants critiques qui menaçaient ses ambitions. 

Nous analyserons les mécanismes de cette stratégie et les moyens de préserver une pensée libre face aux influences étrangères.

Une guerre culturelle orchestrée depuis Paris.

Dès la Guerre froide, la CIA a considéré la culture comme une arme stratégique. 

Le Congrès pour la liberté culturelle (CCF), basé à Paris et révélé comme une façade de la CIA dans les années 1960, illustre cette ambition. 

Selon Charpier, le CCF finançait des revues comme “Preuves” et “Encounter”, des expositions artistiques et des conférences internationales, souvent sous couvert de promotion de la liberté d’expression. 

Ces initiatives ciblaient les élites intellectuelles pour contrer l’influence communiste en Europe. Thomas W. Braden, ancien responsable des opérations culturelles de la CIA, vantait l’efficacité de ces actions : un concert de l’Orchestre symphonique de Boston à Paris, financé par l’agence, avait plus d’impact que des discours diplomatiques.

Charpier révèle que la CIA a infiltré des cercles littéraires et journalistiques français avec des agents qui ont collaboré avec des revues comme “Esprit” et soutenu des figures modérées pour marginaliser les intellectuels de gauche. 

Le rapport de 1985 s’inscrit dans cette logique, notant un basculement idéologique dans les années 1970. 

Après 1945, la gauche, portée par le prestige des résistants communistes, dominait la scène intellectuelle. Des figures comme Jean-Paul Sartre, avec sa critique de l’impérialisme américain et son rôle dans la fondation de “Libération”, représentaient une menace pour Washington. 

La CIA a donc cherché à réorienter la pensée française vers des valeurs pro-occidentales, en s’appuyant sur des réseaux subtils d’influence.

La stratégie de la CIA : réorienter la pensée française.

Le rapport de 1985 se félicite du déclin des idées de gauche radicale en France. 

Après la guerre, les intellectuels marxistes dominaient les débats, tandis que la droite, discréditée par la collaboration avec Vichy, peinait à s’imposer. 

À partir des années 1970, un double mouvement a émergé :

  • D’une part, des penseurs de gauche, déçus par le stalinisme, se sont désengagés ou ont adopté des positions plus modérées. 
  • D’autre part, les « nouveaux philosophes » ont attaqué le marxisme, souvent avec le soutien implicite de la CIA, selon Charpier. 

Ces intellectuels, promus par des maisons d’édition comme Grasset, ont contribué à détourner l’attention des critiques de l’impérialisme américain vers celles de l’URSS.

Charpier détaille comment la CIA a utilisé des financements occultes pour soutenir des éditeurs, des journalistes et des universitaires. 

Par exemple, des bourses et des invitations à des colloques aux États-Unis ont permis de «sensibiliser» des intellectuels français aux valeurs libérales. 

Le rapport de 1985 note que ce virage a rendu « très difficile pour quiconque de mobiliser une opposition significative parmi les élites intellectuelles aux politiques américaines en Amérique centrale ». 

Le cas de Michel Foucault est révélateur. 

Qualifié par la CIA de « penseur le plus influent de France », Foucault s’est éloigné des projets révolutionnaires, critiquant les dérives des idéologies rationalistes. 

Bien que nuancée, cette posture a servi les objectifs de l’agence en désamorçant les appels à des transformations radicales.

La manipulation des institutions culturelles.

La CIA n’a pas seulement ciblé des individus, mais aussi les institutions culturelles. 

Charpier documente comment l’agence a influencé les médias français, notamment à travers des journalistes comme ceux du “Monde” ou de “L’Express”, qui recevaient des financements indirects pour promouvoir des idées alignées sur les intérêts américains. 

Le rapport de 1985 souligne le rôle des universités, où la précarisation des carrières académiques et la promotion de filières techniques ont marginalisé les disciplines critiques comme la philosophie. 

Ce phénomène, encouragé par des réformes éducatives inspirées des modèles anglo-saxons, a réduit l’espace pour une pensée autonome.

Les grandes maisons d’édition, comme Grasset ou Gallimard, ont également été infiltrées, selon Charpier. 

En soutenant des publications pro-occidentales et en marginalisant les auteurs critiques, ces institutions ont contribué à diffuser une culture consumériste inspirée des États-Unis. 

Les médias de masse, en promouvant des figures comme les nouveaux philosophes, ont amplifié ce mouvement, légitimant un ordre naissant. 

Charpier cite l’exemple de la revue “Commentaire”, fondée par Raymond Aron, qui a servi de relais pour des idées atlantistes, souvent avec un soutien discret de la CIA.

Implications pour aujourd’hui : défendre la souveraineté intellectuelle.

Le rapport de 1985 et les révélations de Charpier offrent des leçons cruciales pour le présent. Dans un monde où les influences étrangères – qu’elles viennent des États-Unis, de la Chine ou d’ailleurs – continuent de peser, préserver l’indépendance intellectuelle est un enjeu majeur. 

Voici les principaux enseignements :

1. Reconnaître le pouvoir des idées : 

Comme le montre la CIA, les intellectuels influencent les imaginaires collectifs. 

Les sous-estimer, c’est risquer de devenir les relais d’agendas géopolitiques étrangers.

2. Protéger l’éducation et la culture : 

La technocratisation de l’enseignement et la précarisation des universitaires, souvent encouragées par des modèles importés, limitent la pensée critique. 

Un système éducatif favorisant la réflexion autonome est essentiel.

3. Créer des espaces indépendants : 

Face à des médias alignés sur des intérêts étrangers, des revues et plateformes indépendantes doivent émerger pour permettre des débats libres. 

Charpier souligne que la CIA a ciblé les médias pour contrôler le récit ; des contre-espaces sont donc vitaux.

4. Vigilance face aux ingérences : 

Les méthodes de la CIA, comme les financements occultes ou les réseaux d’influence, restent d’actualité. 

Les révélations de Charpier sur l’infiltration de la presse et des cercles politiques français rappellent la nécessité de défendre la souveraineté culturelle.

5. Surveiller les réseaux transnationaux : 

Charpier expose comment la CIA a utilisé des organisations comme l’OTAN ou des think tanks pour diffuser ses idées. 

Aujourd’hui, des entités similaires pourraient influencer les débats français, nécessitant une vigilance accrue.

Conclusion : vers une pensée libre et souveraine.

Les révélations du rapport de 1985 et de “La CIA en France” montrent que les idées sont un champ de bataille stratégique. 

La CIA a manipulé la pensée française pour servir ses intérêts, en s’appuyant sur des réseaux culturels, médiatiques et éducatifs. 

Face à ces ingérences, il est impératif de protéger les institutions culturelles, de promouvoir des espaces de débat indépendants et de cultiver une pensée ancrée dans les valeurs nationales. Les intellectuels, en assumant leur rôle de gardiens de la souveraineté intellectuelle, peuvent contrer les influences étrangères et forger un avenir où la pensée reste libre et critique. 

La défense d’une pensée souveraine est plus que jamais une nécessité.