Des mots et des choses : modernité, symbolisme et racines.

«Nous parlons avec des mots, mais Dieu parle avec des mots et des choses», disait Saint Thomas d’Aquin.

À son époque, et en réalité depuis les débuts du christianisme, cela était une évidence connue de tous.

Bien avant de dicter aux prophètes les paroles de la Bible, Dieu avait créé l’univers, et il est inconcevable qu’il n’y ait pas laissé les marques de son Intelligence, du Logos divin qui contient en lui la clé de toutes les choses, des faits et des connaissances.

Rien de plus logique, donc – ainsi pensaient les saints et les mystiques – que de chercher dans les formes et les apparences de l’univers physique les signes de l’intention divine qui avait tout créé.

Le texte même de la Bible est si rempli de références à des animaux, des plantes, des minéraux, des parties du corps humain, des accidents géographiques, des phénomènes astraux et climatiques, etc., qui font même que sans une certaine connaissance de la nature physique, sa lecture devient totalement opaque.

Il n’y avait et il n’y a pas moyen d’échapper à cette constatation élémentaire : l’univers était la première des Révélations.

Cette intuition n’avait pas échappé aux peuples païens de l’Antiquité, dont les cultures reposent entièrement sur des efforts prodigieux pour saisir un message divin derrière les phénomènes de la nature terrestre et céleste, et pour faire de la société entière un modèle cosmique en miniature (la bibliographie sur ce sujet est si abondante que je ne commencerai même pas à la citer).

Malgré l’immense variété des langages symboliques qui se sont développés à travers les époques et les lieux, ils obéissent tous à un ensemble de principes permettant d’établir des correspondances entre les conceptions cosmologiques et anthropologiques de ces civilisations.

Ces conceptions furent absorbées et légèrement remodelées par l’Europe chrétienne pour devenir des vecteurs d’une cosmovision biblique.

La principale modification fut un sens plus aigu de la nature dialectique du symbolisme naturel, où les faits de la nature physique n’apparaissaient plus comme des expressions directes de la présence divine, comme dans l’ancien culte des astres, mais comme des indices analogiques qui révélaient et dissimulaient à la fois cette présence (« La Dialectique Symbolique » d’Olavo de Carvalho).

La cosmologie médiévale intégrait l’ancienne carte planétaire ptolémaïque, avec la Terre au centre et les différentes sphères planétaires – correspondant à des dimensions distinctes de l’existence – s’éloignant jusqu’au dernier ciel, demeure de Dieu.

Que cette carte ne devait pas être interprétée comme un simple portrait matériel du monde céleste est prouvé par le fait qu’elle était compensée dialectiquement par une conception opposée, où Dieu était au centre et la Terre à la périphérie extrême.

La tension entre ces deux sphères condensait de manière globale les paradoxes de l’existence humaine dans un environnement naturel qui était à la fois un temple et une prison.

La vision médiévale du ciel n’était pas une cosmographie, mais une cosmologie – une science intégrale du sens de l’existence humaine dans le cosmos.

L’éclatement du débat entre héliocentrisme et géocentrisme a abaissé le niveau de l’imagination publique à un affrontement entre deux conceptions purement matérielles, rompant la tension dialectique entre les deux sphères et réduisant la cosmologie à l’état de simple cosmographie.

Les progrès extraordinaires de cette dernière ont masqué le fait que la modernité ainsi inaugurée s’est retrouvée totalement dépourvue d’une cosmologie symbolique, sans aucun moyen, jusqu’à aujourd’hui, d’articuler la vision scientifico-matérielle de l’univers avec les connaissances d’ordre spirituel : ces deux dimensions coexistent sans jamais s’interpénétrer, comme de l’eau et de l’huile dans un verre, ressurgissant de temps à autre, sous diverses formes, le «conflit entre science et religion» ou «entre raison et foi», qui, en ces termes, ne peut être apaisé que par des arrangements conventionnels de frontières, aussi artificiels et instables que n’importe quel traité diplomatique.

Ce qui était une tension dialectique est devenu un dualisme statique, comme dans une guerre de positions entre des armées immobilisées dans leurs tranchées.

Peut-être le trait le plus caractéristique de la modernité est-il précisément cette coexistence énervante entre une science sans spiritualité et une spiritualité sans base naturelle.

Pour aggraver encore les choses, la rupture entre ces deux dimensions ne s’est pas produite uniquement dans le domaine de la cosmologie, mais aussi dans celui de la métaphysique et de la gnoséologie (la branche de la philosophie étudiant la nature, l’origine et les limites de la connaissance humaine. Elle analyse comment nous savons et validons ce que nous savons). René Descartes, rompant avec l’ancienne vision aristotélico-scolastique de l’être humain comme synthèse indissoluble de corps et d’âme, a érigé un mur de séparation entre matière et esprit, en faisant des substances hétérogènes et incommunicables.

Malgré les nombreuses contestations et corrections qu’il a subies, le dualisme cartésien a fini par enraciner si profondément ses conséquences néfastes dans la mentalité occidentale qu’elles se font encore sentir, même dans le domaine des sciences physiques (voir Wolfgang Smith, « L’Énigme Quantique« ).

Dans la sphère culturelle, cela a conduit à diviser l’ensemble de l’expérience humaine en deux catégories : les objets réels, c’est-à-dire matériels et mesurables, connus par la science physique, et les objets purement pensés, pour ne pas dire imaginaires – lois, institutions, valeurs, œuvres d’art, le monde proprement humain.

Des premiers, on ne pouvait connaître que leurs propriétés mesurables, et il était interdit de chercher en eux un sens ou une intention.

Les seconds étaient pleins de signification, mais n’existaient que comme pensées, comme des «constructions culturelles» sans aucun fondement dans la réalité.

Aussi manifestement nuisibles à la cosmovision chrétienne que fussent ces idées, elles furent rapidement assimilées par l’intelligentsia catholique. Tout au long du XVIIIe siècle, le cartésianisme fut la doctrine dominante dans les séminaires de France.

Les prétendues «hérésies modernistes» n’étaient pas encore apparues, mais l’hégémonie intellectuelle chrétienne était perdue. Elle s’était rendue presque sans combat.

Ainsi commença une ère où une âme chrétienne n’avait d’autre choix que de se conformer à la mentalité moderne ou de s’insurger en vain contre ce qu’elle ne pouvait vaincre – les deux attitudes qui, jusqu’à aujourd’hui, caractérisent respectivement les «modernistes» et les «traditionalistes».

Le coup de grâce fut porté par Emmanuel Kant, lorsqu’il creusa un abîme infranchissable entre «connaissance» et «foi», en soulignant l’autorité universelle de la première et en reléguant la seconde dans l’enclos fermé des simples préférences et fantaisies personnelles – une doctrine qui devint la base non seulement du positivisme scientifique encore dominant dans les universités en général, mais aussi de tout l’«État laïc» moderne, où il n’y a aucune différence légale entre croire en Dieu, en des lutins, en des extraterrestres, en les vertus spirituelles des drogues hallucinogènes ou en la bonté de Satan.

Condamner la cosmologie médiévale parce qu’elle ne coïncide pas, sur certains points, avec les «faits observables du monde physique» est aussi absurde que de condamner un dessin parce qu’il n’y a pas de correspondance biunivoque entre les traits de crayon et les molécules qui composent l’objet représenté.

Les structures représentatives globales ne peuvent être comprises et jugées que dans leur totalité.

Le physicalisme naïf, en s’attachant aux détails les plus visibles, laisse toujours échapper l’essentiel.

La physique d’Aristote fut rejetée au début de la modernité, car elle affirmait que les orbites des planètes étaient circulaires et que son explication de la chute des corps différait de celle de Galilée.

Ce n’est qu’au XXe siècle que le monde académique comprit que, malgré ces détails, l’œuvre d’Aristote restait précieuse, non comme une «physique» au sens moderne, mais comme une méthodologie générale des sciences.

Quatre siècles d’arrogance scientifique avaient rendu incompréhensible un texte encore riche d’enseignements (voir les actes du congrès de l’UNESCO « Penser avec Aristote« , org. M. A. Sinaceur, Toulouse, Érès, 1991).

Le symbolisme naturel, indispensable au christianisme, disparut sous l’effet du physicalisme naïf, qui jugeait dépassé le modèle médiéval des sept sphères planétaires, une conception cosmo-anthropologique complexe et subtile, à cause du débat entre géocentrisme et héliocentrisme.

Relégué hors du champ intellectuel respectable, ce symbolisme ne survécut que comme source occasionnelle de figures poétiques pour des écrivains modernes, dénués de profondeur spirituelle et absorbés par leur propre subjectivité.

Georges Bernanos dénonça cet appauvrissement de l’imaginaire moderne dans des pages cinglantes de « L’imposture« .

Les rares érudits qui continuèrent à s’intéresser à ce sujet furent marginalisés, tant par les universitaires que par l’intelligentsia catholique, plus soucieuse de plaire au physicalisme académique que de défendre le patrimoine symbolique de la foi.

Une œuvre remarquable comme « Le Bestiaire du Christ » où Louis Charbonneau-Lassay recensait et expliquait les symboles et animaux dans l’architecture sacrée médiévale, passa presque inaperçue dans les milieux catholiques, bien qu’elle fût très appréciée par des auteurs musulmans, comme nous le verrons.

Même les écrivains qui comprenaient la cosmologie médiévale n’osaient en parler qu’en termes esthétiques, tout en se pliant à l’autorité du physicalisme.

C.S. Lewis, par exemple, structura ses « Chroniques de Narnia » sur une ascension spirituelle à travers les sept sphères planétaires, mais cacha cette clé symbolique, révélée seulement après sa mort par Michael Ward (« Planet Narnia. The Seven Heavens in the Imagination of C. S. Lewis« , Oxford University Press, 2008). Ward écrit : «Après sa conversion, Lewis jugeait naturellement les religions païennes moins vraies que le christianisme, mais, sans référence à la vérité, il leur trouvait une beauté supérieure. Beauté et vérité devaient être distinguées, ainsi que la bonté.» (p. 27).

Ironiquement, en réintégrant dans son art des éléments du symbolisme païen christianisé par l’Europe médiévale, Lewis s’opposait à la doctrine scolastique de Duns Scot, pour qui le beau, le vrai et le bon (Unum, Verum, Bonum) étaient fondamentalement unis. Cette timidité chrétienne face aux dogmes modernes est presque indécente.

Le philosophe calviniste Herman Dooyeweerd alla plus loin, condamnant la philosophie scolastique, et donc toute la cosmologie médiévale, pour n’avoir pas éliminé les traces du paganisme – une exigence irréaliste que le calvinisme lui-même n’a pas remplie.

Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que le patrimoine symbolique, négligé et relégué, ait été récupéré par des intellectuels musulmans intéressés par une restauration de la culture chrétienne traditionnelle, mais sous l’influence subtile d’organisations ésotériques islamiques.

Depuis le XVIe siècle, personne en Europe chrétienne n’a expliqué le symbolisme spirituel chrétien avec autant de maîtrise que René Guénon, Frithjof Schuon, Titus Burckhardt ou Jean Borella, souvent qualifiés à tort de «pérennialistes» (une école de pensée philosophique et spirituelle qui soutient l’existence d’une vérité universelle ou d’une sagesse éternelle (philosophia perennis) commune à toutes les grandes traditions religieuses et spirituelles de l’humanité).

Membres de tariqas (organisations ésotériques islamiques), ils cherchaient à percer le physicalisme moderne pour imposer une influence intellectuelle islamique, utilisant le traditionalisme chrétien comme un outil, un peu comme Jésus, dans la vision islamique du Second Avènement, serait subordonné au Mahdi.

D’autres penseurs, comme Matila Ghyka, Ananda K. Coomaraswamy ou Mircea Eliade, bien que non liés directement à l’ésotérisme islamique, s’inspirèrent des pérennialistes.

Si la cosmologie symbolique retrouve aujourd’hui son statut de savoir profond et respecté, avec une multiplication des études universitaires, c’est largement grâce à Guénon, Schuon et leurs disciples.

Comme le dit la Bible (Psaume 118:22-23) : «la pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle. C’est là l’œuvre du Seigneur, une merveille à nos yeux.»

Cette prophétie n’est pas encore pleinement réalisée, mais seule la restauration de la cosmologie symbolique peut servir de clé de voûte à une reconstruction de la culture chrétienne.

Les musulmans l’ont compris avant les chrétiens et en ont tiré parti.

Avons-nous une dette envers Guénon, Schuon et les autres ?

Évidemment. Ils nous ont rendu ce qui nous appartenait, même en le revendiquant comme leur.

Il est temps d’affirmer avec force la primauté du christianisme dans ce domaine.

Essence du projet Révolutionnaire : il n’y a qu’un ennemi. Par Olavo de Carvalho.

Écrit dans le “Diário do Comércio, 8 janvier 2007”. 

Le marxisme n’a pas commencé avec Marx et n’est pas né d’une étude scientifique de l’économie.
Tout ce que Karl Marx allait penser et dire – à l’exception du prétexte matérialiste-dialectique et des statistiques qu’il a falsifiées à partir des célèbres “Blue Books” du parlement britannique – était déjà présent dans les doctrines des hérétiques messianiques depuis le XIVe siècle.
Tout : la lutte des classes, la révolution, la socialisation des moyens de production, la dictature du prolétariat, la mission de l’avant-garde révolutionnaire.
Même les idées de Lénine et de Gramsci y sont clairement exprimées.

John Knox, John Huss, Thomas Münzer et autres « prophètes » des débuts de la modernité ne sont pas seulement des précurseurs du mouvement révolutionnaire mondial : ils en sont les créateurs.
Les hommages, entre ambigus et réticents, que leur rendent de temps à autre certains intellectuels de gauche ne servent qu’à exagérer les contributions de la gauche plus récente, en diminuant celles de ces pères fondateurs par le subterfuge de les reléguer dans une série historique prétendument ascendante, dont le sommet est toujours, bien sûr, l’auteur de l’hommage.

L’idée centrale de la révolution messianique peut se résumer en quatre points :
(I) l’humanité pécheresse ne sera pas sauvée par Notre Seigneur Jésus-Christ, mais par elle-même ;
(II) la méthode pour atteindre la rédemption consiste à tuer ou du moins à soumettre tous les méchants, c’est-à-dire les riches ;
(III) les pauvres sont innocents et purs, mais ne comprennent pas leur place dans le projet de salut et doivent donc se soumettre aux ordres d’une élite dirigeante, les « saints » ;
(IV) le massacre rédempteur engendre non seulement une meilleure répartition des richesses, mais aussi l’élimination du mal et du péché, l’avènement d’une nouvelle humanité.

Une hérésie n’est pas « une autre religion » : elle est, par définition, une opposition interne, née au sein même du christianisme, généralement par l’ajout d’un élément exotique qui déforme complètement le message originel et lui donne les significations les plus extravagantes imaginables.
Il n’est donc pas surprenant que l’évolution ultérieure du mouvement révolutionnaire ait été marquée par une tension permanente entre la foi hérétique et la négation de toute foi, entre le pseudo-christianisme et l’anti-christianisme, entre l’ambition de détruire le christianisme et le désir d’en conserver une partie pour parasiter son autorité.
Ce jeu dialectique désoriente l’observateur profane, qui, trompé par les différences apparentes, perd de vue l’unité profonde du mouvement révolutionnaire et finit souvent par servir l’une de ses sous-courants en croyant sincèrement œuvrer pour une cause contre-révolutionnaire, conservatrice, ou même chrétienne ou juive au sens strict.

Une fois l’épidémie des révolutions messianiques éteinte, la deuxième vague du mouvement révolutionnaire prend la forme d’un anti-christianisme et d’un anti-judaïsme explicites.
Les Lumières du XVIIIe siècle ont non seulement prêché ouvertement l’élimination de ces deux fois traditionnelles, mais n’ont pas hésité à inventer contre elles les mensonges les plus aberrants, trouvant cela magnifique et s’en amusant grandement.
Les polémiques anti-chrétiennes d’aujourd’hui semblent presque des modèles de politesse comparées à la virulence de l’inventivité du XVIIIe siècle.
La thèse de l’abbé Antonin Barruel, exposée dans son “Histoire du Jacobinisme” (1798), selon laquelle un plan aurait été ourdi entre Voltaire, d’Alembert, Diderot et l’empereur Frédéric II de Prusse pour une vaste campagne de diffamation visant à couvrir l’Église d’infamie par tous les moyens possibles, semble de plus en plus confirmée.

Le cas de Diderot est particulièrement révélateur.
Dans “La Religieuse”, il raconte l’histoire d’une pauvre jeune fille retenue dans un couvent contre sa volonté.
L’image abominable des nonnes prisonnières, mise en circulation par lui et d’autres penseurs des Lumières bien avant la publication posthume du livre en 1796, est devenue un symbole condensé de tous les crimes que la propagande anti-chrétienne attribuait à l’Église.
Dans la tourmente de la Révolution de 1789, ce symbole s’est transformé en une croyance littérale.
De nombreux révolutionnaires qui envahissent les couvents, tuant moines et nonnes en masse, jurent sincèrement le faire pour libérer les vierges emprisonnées qu’ils imaginaient remplir les sous-sols des cloîtres.
Lorsque quatre-vingts abbayes, monastères et maisons religieuses de Paris avaient déjà été envahis et beaucoup de sang versé, l’Assemblée constituante, perplexe, apprit que partout les nonnes et novices avaient unanimement proclamé leur fidélité à leur état, même en montant à l’échafaud.
Tel était l’esprit des « prisonnières ».

Diderot, bien qu’il soit mort cinq ans avant la Révolution, ne peut être facilement excusé des effets criminels de la haine qu’il a consciemment attisée.
Il ne le peut surtout pas, car il savait parfaitement qu’il n’y avait pas et ne pouvait y avoir de prisonnières dans les couvents, que toutes les nonnes y étaient de leur plein gré, y compris celle qui l’a inspiré pour écrire son roman, la sœur Delamarre, du couvent de Longchamps.
Tout cela n’était qu’une falsification préméditée.

Pendant longtemps, le monde entier a cru la version de Diderot, qui affirmait posséder la documentation complète du cas Delamarre.
En réalité, le dossier était entre ses mains, mais il disparut peu après la publication du roman.
Retrouvé en 1954 par le chercheur George May, sa lecture montre que Diderot était au courant des faits suivants :

1) À Paris, il existait quatre tribunaux, ecclésiastiques et civils, pour juger les demandes de dispense de la carrière monastique, et la règle générale était d’accorder toutes les requêtes. 
2) La sélection des nonnes était extrêmement rigoureuse. L’Église s’efforçait de se débarrasser des fausses vocations, et non de les retenir de force. 
3) Loin d’être une prisonnière du couvent, la sœur Delamarre était la portière, avait les clés et pouvait entrer et sortir à sa guise. 
4) Le seul procès intenté par Mlle Delamarre concernait un litige successoral avec une parente. Pour recevoir un titre nobiliaire en héritage, la nonne devait quitter l’ordre religieux. Mais peu après, ayant renoncé à disputer cet héritage, elle retourna joyeusement au couvent.

Diderot savait tout cela, et sa correspondance avec son ami Jacob Grimm montre que le romancier « éclatait de rire » en concoctant la falsification minutieuse de cette histoire.
Il se divertissait non seulement de la joie féroce de calomnier, mais allait jusqu’au raffinement d’une cruauté mentale bien plus directe.
Au marquis de Croismarre, un chrétien pieux qui lui écrivait, inquiet et en larmes, au sujet du sort de la jeune fille, Diderot répondait avec des inventions inquiétantes, soulignant les souffrances de l’infortunée dans le cloître et savourant jusqu’au bout le plaisir de maintenir cet homme dans l’angoisse.
Il n’est pas étonnant que Diderot ait été l’écrivain préféré de Karl Marx, un autre sociopathe sadique.

D’autres documents découverts par Georges May, postérieurs à la mort de Diderot, montrent que la sœur Delamarre est décédée trente ans après le romancier, toujours en tant que portière du couvent, après avoir courageusement affronté, aux côtés de ses sœurs, les commissaires de la Révolution.
La seule oppression qu’elle avait subie venait des ennemis de l’Église.

Si je devais énumérer et analyser toutes les calomnies inventées par les penseurs des Lumières contre les chrétiens et les juifs, une année entière d’éditions du “Diário do Comércio” ne suffirait pas à les contenir.
Mais le fait est que ces mensonges ont traversé les siècles, se sont profondément enracinés dans l’imaginaire populaire, ressurgissent sous des formes nouvelles et variées, et ont servi à légitimer le massacre des chrétiens en Russie et des juifs en Allemagne.
Des intellectuels et artistes de grand prestige n’hésitent pas à collaborer à ce crime odieux.
Tout ce qui concerne le cas Delamarre était déjà bien connu des historiens lorsque, en 1970, le film de Jean-Luc Godard, “La Religieuse”, a renouvelé l’effet du symbole haineux inventé par Diderot.

Mais – pour revenir à l’argument central –, l’arrivée au pouvoir des jacobins a entraîné un changement de pôle dans la tension dialectique : de la propagande anti-chrétienne, on est passé à un effort ouvert pour créer un simulacre de christianisme destiné à la consommation des masses révolutionnaires.
La rhétorique de la Terreur imite de près celle des pseudo-prophètes messianiques : l’idée d’un apocalypse terrestre, la condamnation radicale du capitalisme, la purification de l’univers par le massacre des riches, la mission privilégiée des « saints », le retour de l’humanité à une ère de pureté originelle – tout cela réapparaît, mais avec le “Contrat social” de Rousseau comme texte sacré à la place des Évangiles.
De plus en plus, l’imitation caricaturale de l’éthos chrétien acquiert une autonomie, se détachant du sens évident du message du Christ et parasitant les sentiments moraux profondément ancrés dans la population chrétienne pour en faire des instruments de légitimation du terrorisme d’État, sous l’inspiration – comme l’écrivait Thomas Carlyle – « du cinquième et nouvel évangéliste, Jean-Jacques, appelant chacun à corriger l’existence pervertie du monde ».

Luciano Pellicani, dans son étude sur “Revolutionary Apocalypse. The Ideological Roots of Terrorism” (Londres, Praeger, 2006), que je commenterai en détail dans une prochaine chronique, observe :
« Ainsi, l’élite révolutionnaire, agissant sur la base du diagnostic-thérapie des maux du monde contenu dans la ‘véritable philosophie’, assume le rôle typique du Paraclet dans la tradition gnostique : elle seule sait ce qui est bon pour la cité. »

Fondée sur cette autorité omnisciente, le salut doit prendre la forme d’un massacre rédempteur.
Robespierre l’exprime clairement :
« Le gouvernement populaire… est à la fois Vertu et Terreur.
La Terreur n’est rien d’autre que la justice sévère et inflexible.
Elle est donc une émanation de la Vertu. »

Pellicani conclut : « Ce concept de la rédemption de l’humanité exige une société organisée comme un couvent militarisé. »
Cette formule réapparaîtra chez les prêtres-guérilleros de la théologie de la libération et dans les projets plus récents de « l’archevêque » Hugo Chávez.

Mais, bien avant cela, le pendule de la révolution oscillera à nouveau de l’autre côté.
Une fois le cycle jacobin terminé, avec l’avènement de l’empire napoléonien, de la Restauration et de la démocratie bourgeoise, les nouvelles formules de l’idéologie révolutionnaire, avec Marx et Bakounine, font évoluer l’anti-christianisme en un athéisme militant.
Karl Marx proclame « haïr tous les dieux » et définit l’athéisme comme « la négation de Dieu, par laquelle s’affirme l’existence de l’homme ».
Pour le marxisme, inspiré à cet égard par Feuerbach, Dieu naît de l’auto-aliénation des pouvoirs de l’homme projetés dans un ciel métaphysique – comme si l’homme avait créé le ciel et la terre, puis l’avait oublié, transférant les honneurs à une entité inexistante : une théorie suffisamment absurde pour séduire des millions d’intellectuels.

Avec l’essor de l’athéisme, les massacres de prêtres et de croyants se multiplient à une échelle jamais imaginée, même par Robespierre.
Entre la guerre civile mexicaine (1857) et le début de la Seconde Guerre mondiale (1939), pas moins de vingt millions de chrétiens sont morts dans des persécutions religieuses visant, selon Lénine, à « balayer le christianisme de la surface de la terre ».
Et le massacre des juifs n’avait pas encore commencé.

Mais peut-être que l’athéisme n’est pas le trait le plus authentique de cette étape du mouvement révolutionnaire.
Marx et Bakounine, comme on le sait, ont participé à des rituels sataniques (voir Richard Wurmbrand, “Marx and Satan”, Living Sacrifice Book Company, 1986, jamais démenti).
Et au moins en Italie, l’apologie de Satan est devenue explicite avec le poète Giosuè Carducci, l’un des grands inspirateurs du mouvement révolutionnaire local :
«Salut, ô Satan, 
Ô rébellion, 
Ô force vengeresse 
De la raison !»

Quoi qu’il en soit, l’impact des massacres a fini par gêner les révolutionnaires eux-mêmes, qui, dans les années 1930, réfléchissaient déjà à des moyens de les contourner.
Antonio Gramsci, dans ses “Cahiers de prison”, enseigne que l’Église ne doit pas être combattue, mais vidée de son contenu spirituel et utilisée comme caisse de résonance de la propagande communiste.

Le succès ultérieur de cette entreprise peut être mesuré par deux faits :

1) L’influence écrasante que les communistes ont réussi à exercer, de l’intérieur comme de l’extérieur, sur le Concile Vatican II, divisant l’Église catholique et provoquant la plus grande fuite de fidèles en deux millénaires de catholicisme. 

2) Le Conseil mondial des Églises, la plus grande organisation protestante mondiale, qui regroupe des centaines d’églises dans tous les pays, officiellement à des fins « œcuméniques », est notoirement une entité pro-communiste qui soutient et finance des mouvements révolutionnaires terroristes.
Les différents Conseils nationaux des Églises sont des entités indépendantes, mais celui des États-Unis, au moins, est encore plus ouvertement pro-communiste que le Conseil mondial.

Parallèlement et en étroite association informelle avec les efforts communistes, un mouvement mondial s’est développé depuis la fin du XIXe siècle, visant à créer la plus grande confusion religieuse possible par une propagande occultiste massive et une résurgence forcée du gnosticisme.
Des phénomènes comme l’essor de l’orientalisme pseudo-mystique de la Nouvelle Ère, le culte des drogues comme « voie d’illumination intérieure », la vague d’expériences psychiques dangereuses parties d’Esalen (Californie) et répandues dans le monde, la prolifération de sectes cherchant à asservir leurs disciples par des pratiques mentales destructrices, peuvent être présentés au public comme une convergence spontanée de tendances ou comme une fatalité historique imposée par « l’esprit du temps ».

Mais il suffit de fouiller un peu les sources pour découvrir qu’il s’agit d’une initiative unitaire, organisée et financée à coups de milliards par les mêmes forces qui se sont autoproclamées chargées de transformer l’ONU en gouvernement mondial d’ici, au plus tard, la fin de la prochaine décennie.

L’oscillation dialectique et pendulaire du mouvement révolutionnaire entre l’anti-religion et la pseudo-religion, combinée à la multiplicité hallucinante des courants qui l’alimentent, désoriente presque totalement le public.
L’envie de prendre position, incessamment nourrie par les médias et le système scolaire, conduit beaucoup de gens à soutenir des mouvements et des idées dont le lien avec le courant central n’est pas immédiatement évident.

Combien de chrétiens conservateurs, voulant sauver l’Église, n’ont-ils pas adhéré à des idées antisémites, pensant que la révolution était essentiellement l’œuvre des juifs ?
Combien d’intellectuels juifs ne se sont-ils pas affiliés à des partis révolutionnaires, sans remarquer qu’ils creusaient ainsi la tombe de leur peuple ?
Combien de protestants, confondant le catholicisme avec sa contrefaçon révolutionnaire, ne pensent-ils pas que leur meilleure option est de détruire l’Église catholique ?
Combien de catholiques, enivrés de pureté doctrinale, ne voient-ils pas l’américanisme comme un ennemi, faisant ainsi la guerre à la seule nation qui a créé une synthèse fonctionnelle de culture chrétienne, d’économie prospère et de démocratie politique ?

Combien de défenseurs de la démocratie capitaliste ne s’inspirent-ils pas des idées des Lumières, leur paraissant équilibrées et rationnelles, sans savoir que, par leur conception réductrice de la raison, elles portent en elles la graine de l’irrationalisme révolutionnaire romantique, et surtout sans remarquer que les Lumières, avec toute leur apparence élégante et polie, ont créé la première campagne organisée de diffamation anti-chrétienne, mettant en circulation des mensonges scandaleux que des millions d’idiots répètent encore aujourd’hui comme des perroquets à travers le monde ?

Combien de défenseurs des positions libérales en économie ne croient-ils pas pouvoir les concilier avec un athéisme militant qui, en érodant les fondements spirituels et moraux du capitalisme, l’invite à se transformer précisément en cette « idolâtrie du marché » dont la propagande communiste l’accuse, aidant ainsi à transférer aux révolutionnaires, ainsi qu’aux radicaux islamistes, le monopole de l’autorité morale ?

En choisissant l’ennemi selon les traits les plus marquants qui s’opposent à leurs préférences subjectives, toutes ces personnes ne font qu’alimenter le feu de la tension dialectique dont se nourrit et se renforce le mouvement révolutionnaire mondial.

En vérité, il n’y a qu’un ennemi.
On ne peut le combattre efficacement sans saisir son unité derrière la variété hallucinante de ses versions, incarnations et apparences.

Il y a quelques décennies, cette unité était difficile à percevoir, faute de documentation suffisante pour la prouver. Aujourd’hui, les preuves sont si abondantes que continuer à l’ignorer commence à ressembler à une forme de complicité criminelle.

NOTES.

L’amour passionné que beaucoup d’intellectuels d’aujourd’hui portent à ces aberrations révèle non seulement leur haine du christianisme, leur désir de l’exterminer par tous les moyens possibles, mais aussi un manque d’intelligence qui frôle le monstrueux.

Bart D. Ehrman, l’auteur médiatisé de “The Lost Gospel of Judas Iscariot. A New Look at Betrayer and Betrayed” (Oxford University Press, 2006), par exemple, n’est qu’un fanatique gnostique déguisé en érudit universitaire, capable de réaliser des recherches philologiques dans plusieurs langues anciennes mais incapable de repérer les contradictions les plus puériles de son propre texte.
Pour ce type d’érudits, engagés à discréditer les évangiles originaux en s’appuyant sur des textes gnostiques écrits deux siècles après eux, les chaires universitaires, NBC, History Channel, National Geographic et toute la presse chic sont toujours ouvertes, pour la simple raison que ces institutions sont financées et dirigées par le même noyau de milliardaires déterminés à fabriquer une religion bionique pour remplacer le christianisme au troisième millénaire

Paul Hazard, “La Pensée européenne au XVIIIe siècle” (Paris, Boivin, 1946), est un classique de l’histoire des idées. 

Jean Dumont, “La Révolution française ou Les Prodiges du sacrilège” (Paris, Criterion, 1984). 

« Salut, ô Satan, ô rébellion, ô force vengeresse de la Raison ! » est extrait de l’ode « A Satana », que les connaisseurs de l’italien peuvent lire sur http://digilander.libero.it/interactivearchive/carducci_satana.htm. 

Ricardo de la Cierva, “Las Puertas del Infierno. La Historia de la Iglesia Jamás Contada” (Madridejos, Toledo, Fénix, 1995), et “La Hoz y la Cruz. Auge y Caída del Marxismo y la Teología de la Liberación” (ibid., 1996). 

Bernard Smith, “The Fraudulent Gospel. Politics and the World Council of Churches” (Londres, The Foreign Affairs Publishing Co., 1977). 

C. Gregg Singer, “Unholy Alliance. The Definitive History of the National Council of Churches and Its Leftist Policies – From 1908 to the Present”, sur http://www.freebooks.com/docs/39be_47e.htm. 

Il y a une documentation extensive dans Lee Penn, “False Dawn. The United Religions Initiative, Globalism and the Quest for a One-World Religion” (Hillsdale, NY, Sophia Perennis, 2004). 

La question de la place occupée par l’islamisme dans le processus décrit ici nécessite un examen séparé, qui sera effectué dans un prochain article.

L’athéisme ne serait-il pas le masque moderne d’une ruse millénaire ?

Introduction :

Dans nos sociétés modernes, de plus en plus de gens se disent athées :

En France, ils étaient 14 % en 2005 et 29 % en 2012 (WIN-Gallup International). Une analyse des données de l’European Social Survey suggère une augmentation jusqu’à 54 % en 2020 pour ceux sans dénomination religieuse.

Au Canada, les non-croyants sont passés de 16,5 % en 2001 à 21,8 % en 2008. 

Le recensement de 2021 de Statistique Canada montre que 34,6 % des Canadiens n’ont pas d’affiliation religieuse, marquant une augmentation significative.

Une enquête de Research Co. en 2023 indique 37 % d’agnostiques, athées ou sans religion, confirmant la forte tendance haussière.

Aux États-Unis, les athées représentaient 1 % en 2005, puis 5 % en 2012 (Pew Research Center et Phil Zuckerman).

L’étude de Pew Research Center publiée en février 2025, indique que 29 % des adultes américains sont sans affiliation religieuse, incluant 5 % d’athées, 6 % d’agnostiques et 19 % de « rien en particulier ».

Une source de Visual Capitalist pour 2025 confirme ce chiffre à 30 %, ce qui est cohérent avec les tendances récentes.

L’athéisme semble triompher dans certaines villes d’Occident. 

Mais si l’athéisme, qu’on présente comme une idée neuve, était en fait une idée ancienne apparaissant sous différents visages ?

Des écrivains aux poètes, philosophes, aux cercles plus ou moins cachés, une idée s’est peu à peu propagée au fil des siècles : l’homme peut remplacer Dieu. 

1. Les racines : quand l’homme rêve de devenir dieu.

Imaginez une voix qui murmure : « Vous pouvez être comme des dieux. » 

(C’est le serpent de la Genèse avec la phrase «Eritis sicut Dii»)

Puis cette idée a avancé et certains courants mais surtout le manichéisme, voit le serpent de la Bible comme un héros libérateur.

Dans les Kephalaia (textes manichéens découverts à Medînet Mâdi, Égypte, datant du IVe siècle), un passage évoque la connaissance apportée à Adam pour le libérer de la domination des Archontes (les puissances matérielles). 

Voici un extrait traduit des Kephalaia (chapitre 64, selon l’édition de Iain Gardner, The Kephalaia of the Teacher, 1995) :

« Le Sauveur lumineux a envoyé un messager aux premiers hommes pour qu’ils goûtent à l’arbre de la connaissance, afin que leurs yeux s’ouvrent et qu’ils reconnaissent la Lumière qui était cachée par les Archontes. »

Saint Augustin, ancien manichéen, confirme cette vision dans “Contre les Manichéens” (De Genesi contra Manichaeos, Livre II, chapitre 26, vers 397) :

« Les Manichéens disent que le serpent était un envoyé du Principe de la Lumière, chargé de donner à Adam et Ève la connaissance pour les libérer du joug du Créateur des corps, qu’ils appellent le Dieu des Ténèbres. »

Dans Contre les hérésies (Adversus Haereses, Livre I, chapitre 30, vers 180), Irénée décrit la cosmologie ophite et leur vision du serpent :

« Ils [les Ophites] disent que le serpent était Sophia elle-même, ou un envoyé de la Sagesse divine, qui enseigna à Adam et Ève la vérité sur leur origine céleste. 

Ils affirment que le Créateur, qu’ils appellent Ialdabaoth, voulait garder l’humanité dans l’ignorance, mais que le serpent, par son conseil, leur a donné la connaissance de la Lumière supérieure, les rendant ainsi semblables aux dieux. »

C’est en effet le manichéisme, fondé par Mani qui réinterprète le récit biblique du Jardin d’Éden : dans cette interprétation le serpent est vu comme un dispensateur de connaissance libérant Adam et Ève du contrôle d’un Dieu soit disant oppresseur. 

Dans cette vision malfaisante, le serpent est un agent qui apporte la connaissance pour libérer l’esprit. Et l’esprit serait soi-disant victime des ténèbres du mal personnifiées par le corps. 

Le serpent dans cette vision manichéenne accuse Dieu le tyran d’opprimer l’homme et affirme que c’est l’homme qui est divin.

Mais bien sûr cette vision qui divinise l’homme finit par le rendre ivre d’orgueil en même temps que mal à l’aise, sans repères et désemparé. 

Au XVIe siècle, cette vision prend un nouveau visage avec l’humanisme en Angleterre qui vise à inventer les repères enlevés. Mais bien sûr ce ne sera qu’un château de sable destiné à s’écrouler car la base est erronée. Analysons cela ensemble en différentes étapes. 

Thomas More écrit Utopie, un livre qui imagine un monde où l’homme se perd dans les plaisirs. Il imagine une île fictive où la société, débarrassée des contraintes traditionnelles, valorise les plaisirs terrestres et une forme de rationalité qui marginalise la religion.

Dans le Livre II, More décrit les pratiques des Utopiens :

« En Utopie, les plaisirs du corps, comme manger, boire et les joies sensuelles, sont hautement estimés, pourvu qu’ils soient modérés par la raison. […] 

Le mariage n’est pas un sacrement divin, mais un contrat libre, dissoluble si les conjoints ne s’entendent plus. » (Utopie, trad. Marie Delcourt, 1966, p. 145-147).

L’humanisme de More s’inscrit dans un courant européen qui redécouvre les textes antiques (Platon, Cicéron) et valorise la raison humaine. 

Cependant, en plaçant l’homme au centre, l’humanisme érode discrètement et très subtilement la centralité de Dieu. 

C’est une vision qui, comme nous allons le voir ci-dessous, va s’imposer de façon triomphale avec l’athéisme moderne.

Érasme, ami de More, dans Moriae Encomium, prône une religion intérieure, rationalisée, et alimente l’idée que Dieu n’est plus indispensable.

Ces humanistes militent pour un monde dans lequel Dieu devient inutile.

C’est un premier pas vers l’athéisme discret des Lumières.

Puis apparaissent William Stanley et Shakespeare avec un théâtre qui présente l’homme comme un dieu tragique, seul face à l’univers.

2. La modernité : l’athéisme prend le pouvoir.

Un siècle avant la révolution française, Francis Bacon, dans La Nouvelle Atlantide, imagine une société parfaite, dirigée par des savants et alimente l’idée que Dieu n’est pas indispensable.

William Blake, dans Le Mariage du ciel et de l’enfer, fait de Satan un héros et dans Caïn, ce drame poétique de Lord Byron, Lucifer est dépeint comme une figure rebelle, défiant un Dieu perçu comme autoritaire et injuste. «Le Serpent avait raison» reflète l’esprit de l’œuvre.

Shelley, ami de Byron, imagine un univers où tout est divin, sans besoin de Dieu. 

Ces poètes, admirés en France par Victor Hugo, font de l’athéisme une cause séduisante, où l’homme se proclame créateur. Victor Hugo écrit dans La Fin de Satan : «Dieu n’est qu’un mot rêvé pour expliquer le monde. (…) Mais l’homme, en se créant, crée un second univers.» 

Plus proche de nous, le New Age propose une spiritualité sans Dieu alors que le transhumanisme rêve d’un homme immortel. 

3. Crises dans l’Église et résistances héroïques.

Dès le XVIe siècle, des humanistes comme Thomas More sèment des idées qui divisent et confondent mais c’est au XXe siècle que le Concile Vatican II ouvre véritablement la porte aux grands changements qui diluent la doctrine : la réforme liturgique et la perte de sacralité, l’œcuménisme et le relativisme, la liberté religieuse et l’ambiguïté, la collégialité et l’autorité affaiblie.

Le résultat est un vide spirituel, un monde sans repères et une Église complice de l’athéisme moderne. 

Mais des héros ont résisté bien sûr et grâce à Dieu : dès les premiers siècles, les Pères de l’Église et des conciles, comme celui de Nicée, ont combattu ces idées trompeuses.  Saint Athanase a défendu la divinité du Christ contre l’hérésie arienne, qui niait la consubstantialité du Fils avec le Père. «Si le monde est contre la vérité, alors je suis contre le monde» (Athanase d’Alexandrie, De Incarnatione Verbi Dei, et actes du Concile de Nicée, 325).

Au XIXe siècle, le pape Pie IX condamne le libéralisme.  «Il est erroné de dire que la liberté de conscience et des cultes est un droit propre à tout homme» (Syllabus, proposition 15. Pie IX, Quanta Cura et Syllabus des erreurs, 8 décembre 1864).

Pie X s’attaque au modernisme qui cherchait à adapter la doctrine catholique aux idées modernes, relativisant la vérité. «Le modernisme est le cloaque où aboutissent toutes les hérésies» (Pascendi Dominici Gregis, 8 septembre 1907).

Léon XIII remet à l’honneur la pensée de Thomas d’Aquin pour contrer la modernité, en prônant la scolastique comme rempart contre les erreurs. Dans son encyclique, il a encouragé l’étude de Thomas pour ancrer la théologie dans la raison et la foi, en renforçant la doctrine catholique. «La doctrine de Thomas d’Aquin est un remède aux maux de notre temps» (Aeterni Patris, 4 août 1879).

Des missionnaires, comme Roberto de Nobili en Inde, affrontent le bouddhisme avec des arguments solides, défendant la foi face aux séductions orientales. Il a appris le tamoul et le sanskrit pour dialoguer avec les élites, réfutant les idées de réincarnation et de karma par des arguments rationnels et théologiques. Son travail a converti des milliers de personnes malgré l’opposition. «Je suis devenu Indien pour gagner les Indiens au Christ» (Informatio de quibusdam moribus nationis indicae, archives jésuites, 1613.)

4. Raison et inversions philosophiques.

René Descartes, au XVIIe siècle, a jeté les bases d’un rationalisme qui ébranle subtilement le surnaturel. Dans son Discours de la méthode, Descartes prône un doute méthodique radical, sous-entendant que le surnaturel, invisible par nature, est encore moins digne de confiance et serait soit disant détaché de l’expérience humaine.

Cela va plus loin encore lorsqu’un siècle plus tard, Emmanuel Kant, dans La Religion dans les limites de la simple raison (1793), propose une religion épurée, réduite à des principes moraux accessibles par la raison seule. «La religion véritable n’a pas besoin de révélations surnaturelles, mais repose sur la moralité universelle que la raison discerne» (trad. J. Gibelin, 1952, p. 12). Cette approche, séduisante pour un monde de plus en plus athée, alimente l’idée que l’homme peut se passer du surnaturel, renforçant la vision inversée où l’homme se proclame autonome. Cette inversion érode la transcendance divine, transformant Dieu en une idée qu’on peut rejeter d’un revers de main lorsque l’on croit que l’homme se réduit froidement à ses pensées. 

Thomas d’Aquin, au contraire, offre une réponse équilibrée. Là où Descartes et Kant placent la raison au-dessus de la foi, il affirme que l’homme, créature dépendante de son Créateur, trouve la vérité dans leur harmonie. Le thomisme est ancré dans l’idée que Dieu a créé un monde intelligible.

Louis Lavelle, dans La Dialectique de l’éternel présent (1928), enrichit cette perspective en soulignant que la raison humaine s’épanouit en reconnaissant sa limite et son origine dans l’Être divin. «L’homme n’est pas un absolu, mais un être en relation, appelé à se dépasser vers Dieu», écrit-il, contredisant les illusions d’autonomie promues par le rationalisme. 

Conclusion.

L’athéisme n’est pas le moteur de la modernité, mais son symptôme le plus sombre. 

Une même tromperie se perpétue, la même ruse se répète depuis un millénaire en faisant de l’homme un faux dieu. 

La liberté véritable ne réside pas dans l’autonomie illusoire et désespérée car enchaînant l’humanité dans un relativisme spirituel. 

Elle repose sur la communion avec le Créateur, source de tout sens et de toute vie. 

Un chemin a été tracé :  l’union de la raison et de la transcendance.

Entretien de l’archevêque Carlo Maria Viganò, par Steve Bannon de War Room, le 03 mai 2025.

**Steve Bannon :**

Récemment, un groupe de catholiques américains a demandé au président Trump d’enquêter sur l’éventuelle implication du gouvernement américain dans la série d’événements ayant conduit à la démission du pape Benoît XVI le 11 février 2013, et au conclave qui a élu François le 13 mars 2013.

Vous avez récemment appelé l’administration Trump à « enquêter sur le plan de l’État profond pour éliminer Benoît XVI ».

Pensez-vous que l’administration Obama/Biden a interféré dans l’abdication de Benoît XVI et l’élection de Jorge Bergoglio ? Si oui, pourquoi ?

**Archevêque Viganò :**

Si nous ne parlions pas de l’Église – ou plus précisément du Vatican – mais d’une nation souveraine, les preuves d’un coup d’État ne seraient contestées par personne. D’un autre côté, nous savons que l’État profond a interféré à plusieurs reprises dans les gouvernements de nombreuses nations et continue de le faire par le biais de ses émissaires.

Il y a quelques jours à peine, le cardinal Burke a dénoncé la tentative du « président » Macron d’exercer une pression sur le collège des cardinaux pour empêcher l’élection d’un pape conservateur qui remettrait en question les politiques de l’Union européenne.

Grâce aux courriels de John Podesta révélés par Wikileaks, nous savons que le schéma utilisé dans la sphère civile pour fomenter des « révolutions colorées » a été reproduit servilement dans la sphère ecclésiastique.

Le mode opératoire est le même : l’État profond finance des mouvements idéologiques et des groupes de pression sociale par le biais de l’USAID et d’autres agences gouvernementales pour simuler une dissidence contre le Magistère de l’Église catholique, exerçant ainsi une pression sur la hiérarchie pour qu’elle adopte des réformes, toujours dans un sens « progressiste ».

Parallèlement, la partie de la hiérarchie complice de cette opération subversive utilise cette dissidence « virtuelle » pour légitimer des réformes que personne ne demande : sacerdoce féminin, légitimation de l’homosexualité, démocratisation apparente de l’autorité par la « synodalisation » de la papauté monarchique, etc.

Tout repose donc sur la fausse prémisse qu’il existe un problème (artificiellement créé et absolument non ressenti par le peuple chrétien), qui peut être résolu par la solution proposée (qui, dans des conditions normales, ne pourrait même pas être envisagée).

Une telle interférence dans le gouvernement de l’Église catholique est allée jusqu’à théoriser la nécessité de remplacer le pontife alors en fonction, Benoît XVI, par un émissaire de l’État profond qui mettrait en œuvre son plan subversif.

Et c’est exactement ce qui s’est produit peu après : Benoît XVI a été forcé de démissionner ; Jorge Mario Bergoglio a été élu lors du « conclave » de 2013 ; et ce jésuite argentin a effectivement exécuté les ordres qu’il avait reçus.

Je note également, en passant, qu’en toile de fond de ce scénario troublant, il y a un élément constant : tous les protagonistes du coup d’État appartenaient à l’élite pédophile : d’Obama à McCarrick, en passant par Hillary Clinton, John Podesta et les Biden…

Il est donc absolument essentiel que la nouvelle administration américaine – dans laquelle le vice-président JD Vance est un catholique pratiquant – enquête sur ces aspects et mette en lumière l’implication des administrations précédentes.

Nous savons qu’elles ont été complices et promotrices non seulement du coup d’État au Vatican, mais aussi d’autres opérations similaires, étrangères et internes – je pense avant tout à la fraude électorale de 2020.

Une fois les preuves et les noms des coupables disponibles, la hiérarchie catholique ne pourra pas ignorer des faits politiquement pertinents en utilisant l’excuse qu’il s’agit de « simples questions canoniques ».

**Steve Bannon :**

Qui pensez-vous a joué un rôle déterminant dans ce coup d’État ? Comment des preuves d’ingérence étrangère dans une élection papale affecteraient-elles l’Église catholique sur les plans pratique et canonique ?

**Archevêque Viganò :**

Ce coup d’État s’inscrit dans un coup d’État mondial plus large organisé par le lobby subversif de la gauche woke (sur le front idéologique) et le Forum économique mondial (sur le front financier).

Son objectif est la destruction de toute forme de résistance à l’établissement de l’Ordre mondial nouveau, l’instauration de gouvernements totalement contrôlés par une élite de technocrates, et l’établissement d’une nouvelle Religion de l’Humanité qui donne des fondements doctrinaux et moraux à la dystopie globaliste.

Dans l’esprit de ces criminels dévoués à l’Antéchrist – car c’est du royaume de l’Antéchrist dont il s’agit – Bergoglio devait être le premier « pape » de la nouvelle église œcuménique et synodale préparée depuis Vatican II.

C’est précisément en raison de cette hétérogénéité totale, même par rapport à ses prédécesseurs immédiats (et même par rapport au plus progressiste d’entre eux), que Bergoglio ne peut être considéré comme ayant été pape de l’Église catholique.

Il est clair que, si cette ingérence dans le conclave de 2013 pouvait être démontrée, elle entraînerait la nullité de l’élection et l’illégitimité du pontificat de Bergoglio. Cela constituerait en effet un grand reset, car cela annulerait tous les actes de magistère et de gouvernement de Bergoglio, de ses « encycliques » hérétiques à ses nominations d’évêques et de cardinaux.

Avant que le prochain conclave ne commence, il est essentiel de vérifier que les membres du Collège des cardinaux sont réellement légitimes, car quiconque prétendrait être élu pape par le conclave verrait autrement sa légitimité compromise.

**Steve Bannon :**

Le 1er juillet 2025, l’archidiocèse de Détroit fermera 28 paroisses florissantes de la messe en latin sur ordre du nouvel archevêque Edward Weisenburger.

Quel conseil donnez-vous aux catholiques traditionalistes qui assistent à ces messes ? Face à la répression généralisée des messes en latin florissantes aux États-Unis et dans le monde, comment les catholiques doivent-ils réagir ? Doivent-ils résister ?

**Archevêque Viganò :**

La haine pour la messe traditionnelle est l’une des marques distinctives des ennemis du Christ. Cette haine est certainement motivée par le fait que la messe en latin ne laisse aucune place aux erreurs et hérésies qui s’opposent aux vérités du dogme catholique.

Il est significatif que ce soient précisément les évêques et cardinaux obsédés par la « synodalité » qui piétinent la volonté de millions de catholiques qui demandent seulement de pouvoir accéder à la messe de tous les temps.

Cela expose la tromperie de ceux qui se gargarisent de slogans grandiloquents sur la participation active des fidèles (« actuosa participatio ») et sur le rôle des laïcs dans l’Église – tant proclamé par le Concile – dans le seul but de retirer l’autorité aux bons pasteurs et de la transférer à de nouveaux tyrans.

Les fidèles catholiques – et avec eux les prêtres, les évêques et les religieux – ont le droit de ne pas être privés de la messe apostolique, que Notre Seigneur a confiée à l’Église pour qu’elle soit sauvegardée et transmise sans changements arbitraires. Ce droit existait avant l’imposition du Novus Ordo par Paul VI, et a été réaffirmé par le Motu Proprio Summorum Pontificum de Benoît XVI, que Bergoglio a pratiquement supprimé avec Traditionis Custodes.

Je rappelle aux catholiques que l’un des outils les plus efficaces pour contraindre leurs pasteurs consiste à n’allouer leurs offrandes financières qu’aux diocèses et communautés où ils ont véritablement la possibilité de rester catholiques.

Lorsque leurs excellences se retrouveront sans l’argent des fidèles d’un côté et sans le financement gouvernemental de l’USAID de l’autre, elles seront forcées de faire ce qui aurait dû être leur devoir dès le départ.

**Steve Bannon :**

En 2023, l’administration Biden, par le biais du FBI, a lancé une campagne contre les catholiques traditionalistes qui assistent à la messe en latin, les qualifiant d’« extrémistes violents motivés par des raisons raciales ou ethniques (RMVEs) parmi les catholiques traditionalistes radicaux (RTC), une idéologie qui présente presque certainement des opportunités pour l’atténuation des menaces par l’exploration de nouvelles voies pour les déclencheurs et le développement de sources ».

À votre avis, pourquoi les forces de l’ordre fédérales ciblent-elles des catholiques traditionalistes pacifiques comme des extrémistes violents ? Quelle pourrait être la motivation des forces de l’ordre pour cibler systématiquement les participants à la messe en latin ?

Ce harcèlement pourrait-il découler du décret Traditionis Custodes de Bergoglio et de sa répression de la messe en latin ? Y a-t-il un lien ?

**Archevêque Viganò :**

Saint Pie X disait que les vrais catholiques sont ceux qui sont fidèles à la Tradition, et il avait absolument raison ; à tel point qu’ils sont aussi les seuls à ne pas être appréciés par les ennemis de l’Église, tandis que les soi-disant « catholiques adultes », les progressistes, les « catholiques libéraux », les « catholiques woke », sont très appréciés.

Si Bergoglio a réussi à obtenir tant d’admiration de la part de ceux qui détestent l’Église catholique et la papauté, c’est parce que l’élite le considérait comme « l’un des leurs », tout aussi révolutionnaire, tout aussi imprégné de philanthropisme maçonnique, tout aussi œcuménique, syncrétique, inclusif, vert et woke.

Nous sommes parvenus au zénith d’un paradoxe dans lequel le pouvoir civil, usurpé par les traîtres de l’État profond, s’allie au pouvoir religieux, usurpé par les traîtres de l’Église profonde.

Il n’est donc pas surprenant que le « bras séculier » soit venu en aide à l’Église bergoglienne, ciblant les ennemis de Bergoglio – c’est-à-dire les vrais catholiques – parce qu’il les considère également comme des ennemis de la société woke et de l’élite globaliste.

Cependant, avec l’élection de Donald Trump aux États-Unis d’Amérique, la machine infernale de l’Ordre mondial nouveau s’est en quelque sorte enrayée, mettant en crise un système de corruption, de conflits d’intérêts et de chantages qui semblait fonctionner parfaitement.

À un moment où l’État profond perd du pouvoir dans la société civile, l’Église profonde recule également au sein de l’Église catholique, car ce sont les deux faces d’une même médaille.

Il appartient aux citoyens et aux croyants de soutenir les bons dirigeants et les bons pasteurs, afin qu’ils puissent enfin rendre justice à ce coup d’État mondial qui menace toute l’humanité.

**Steve Bannon :**

Quel a été l’impact de l’invasion massive d’immigrants musulmans sur des nations (anciennement) catholiques comme l’Irlande ? Cet afflux de migration incontrôlée fait-il partie d’un plan globaliste stratégique visant à éradiquer le christianisme ?

Est-ce le résultat d’une perte de foi ? Le Concile Vatican II a-t-il eu un impact sur la déchristianisation de l’Europe ?

Pourquoi Bergoglio soutiendrait-il la destruction de la culture chrétienne en Europe et ailleurs avec des frontières ouvertes ?

**Archevêque Viganò :**

Une lutte épique est en cours entre le Bien et le Mal, entre Dieu et Satan, entre ceux qui reconnaissent le Christ comme Roi et ceux qui travaillent à l’établissement du royaume de l’Antéchrist.

Cette lutte atteint sa phase finale, mais elle a été préparée depuis un certain temps, en particulier depuis que les ennemis du Christ se sont organisés en une anti-église, à savoir la franc-maçonnerie, qui est intrinsèquement anti-catholique, car anti-chrétienne et dévouée à Satan.

Le but de la franc-maçonnerie – et donc de l’Ordre mondial nouveau – est l’effacement du Christ par l’annulation de la société chrétienne, de la culture chrétienne, de la civilisation chrétienne et, évidemment, de la religion catholique.

Satan n’accepte pas la défaite que lui a infligée Notre Seigneur sur le Golgotha et, incapable de vaincre Celui qui l’a déjà vaincu pour toujours, il se venge sur les hommes, essayant d’en entraîner le plus possible en enfer.

Pour effacer la présence du Christ de la vie de chacun d’entre nous, Satan doit agir sur plusieurs fronts : le public et le privé, celui de la famille et celui de l’éducation, celui de la culture et du divertissement, de la science et de la finance.

Il souhaite donc que toutes nos actions – qui, dans une société chrétienne, sont orientées vers le Bien – soient corrompues au point de rendre presque impossible pour quiconque de faire de bonnes actions, de suivre l’Évangile, d’obéir aux Commandements et de transmettre les principes de notre Foi et de notre Morale.

Il ne s’agit pas seulement de nous faire accepter comme « légitime » le fait que d’autres puissent « légitimement » faire le mal – par exemple avec l’avortement – mais de faire en sorte que chacun d’entre nous se sente coupable de persister à ne pas vouloir faire le mal, de ne pas vouloir considérer comme un « droit humain » de déchirer un enfant innocent dans le ventre de sa mère ou de mutiler un adolescent par une transition de genre.

C’est la mentalité du « Qui suis-je pour juger ? » que Bergoglio a traduite en principe moral dès le début de son « pontificat ».

Pour atteindre son objectif de destruction de tout principe religieux, cependant, Satan avait besoin d’avoir à ses côtés les dirigeants de la hiérarchie catholique, afin que l’Église de Rome – notoirement anti-révolutionnaire, anti-libérale et anti-maçonnique – devienne une alliée et complice de ceux qu’elle considérait jusqu’à hier comme ses ennemis les plus redoutables.

Sans les condamnations autrefois prononcées par les papes contre la franc-maçonnerie, le libéralisme, le matérialisme athée et le modernisme, l’Église pouvait et devait devenir – dans le plan de la franc-maçonnerie – non plus la gardienne de la Vérité contre l’erreur, mais la propagatrice même de l’erreur contre la Vérité, détournant l’autorité spirituelle ecclésiastique pour la faire travailler à la perte des âmes.

Le Concile Vatican II a servi exactement à cet effet : saper les principes traditionnels et insinuer dans l’Église catholique les principes révolutionnaires contre lesquels l’Église s’était toujours battue avec acharnement.

L’œcuménisme de Vatican II a posé les bases doctrinales de l’immigrationnisme, car c’était la prémisse nécessaire pour légitimer l’invasion incontrôlée de l’Europe par des hordes de musulmans sans provoquer de réaction de la part des peuples envahis.

Nos dirigeants – tant civils que religieux – nous ont trahis, nous ordonnant d’accueillir ceux qui représenteront bientôt la majorité de la population en âge militaire et qui, en raison de lois misérables, s’enrôlent même dans nos forces armées.

Nous sommes confrontés à une substitution ethnique imposée par l’élite subversive de l’ONU et de l’Union européenne : une islamisation forcée dans laquelle certains gouvernements vont jusqu’à emprisonner leurs propres citoyens parce qu’ils se plaignent de la dégradation et de la criminalité importées par les nouveaux barbares, absolvant systématiquement tout immigrant, quelle que soit la gravité de ses crimes.

Il est clair que dans ce plan de destruction sociale, la complicité de l’Église bergoglienne a été décisive, et Bergoglio devra en répondre devant Dieu et le tribunal de l’histoire.

Mais ce n’est pas tout. Les musulmans qui viennent en Europe en croyant pouvoir la soumettre à la charia ignorent qu’il y a un troisième protagoniste – que nous connaissons bien – qui provoque intentionnellement un choc ethnique et religieux entre le christianisme et l’islam, car une guerre civile et religieuse dans les pays occidentaux légitimerait de nouvelles restrictions des libertés fondamentales et permettrait l’interdiction de toute forme de culte extérieur, au nom du « respect mutuel ».

**Steve Bannon :**

Au cours de votre longue carrière de diplomate au Vatican, avez-vous déjà vu un pape dénigrer publiquement un dirigeant politique comme Bergoglio l’a fait lorsqu’il a qualifié Trump d’« anti-chrétien » en pleine campagne politique ?

Pensez-vous que cette déclaration faisait partie d’une stratégie globaliste pour saper l’élection de Trump ou était-ce simplement l’opinion personnelle de Bergoglio ?

**Archevêque Viganò :**

Bergoglio a démontré sa totale extranéité à la papauté romaine non seulement sur les plans doctrinal, moral et liturgique, mais aussi de manière plus banale, de sa façon de s’habiller au langage qu’il utilisait.

Au Vatican, il était connu pour ses accès de colère furieux et les expressions grossières auxquelles il avait recours. Chaque geste de Bergoglio était conçu pour provoquer embarras et scandale, pour rompre le protocole et créer un précédent pour des violations plus graves des normes cérémonielles.

Ses commentaires apparemment spontanés servaient à supprimer la formalité – et donc l’autorité – des déclarations du « pape » et à les attribuer à lui-même, de sorte que ce n’était pas « le pape » qui parlait, mais lui.

En même temps, les énormités et absurdités que nous l’avons entendu prononcer – notamment les attaques contre le président Trump qu’il ne s’est même pas donné la peine de dissimuler – avaient toujours l’« excuse » de ne pas faire partie officiellement des documents pontificaux, de manière à faire passer le message sans avoir à en assumer pleinement la responsabilité.

Un tel double langage était répugnant pour tout vrai catholique, démontrant une fois de plus que Bergoglio considérait son « papauté » comme une propriété qu’il se croyait autorisé à utiliser contre la papauté catholique.

Bergoglio nous a été imposé comme le pape de l’élite, comme le chef de l’anti-église globaliste, et à ce titre, il a toujours exigé obéissance et soumission.

Il était le prédicateur de l’indifférentisme religieux, du relativisme moral, des revendications paupéristes de l’« Église amazonienne » et du lobby LGBTQ.

Quand Bergoglio ouvrait la bouche, il parlait comme le porte-parole de Davos. Ses condamnations n’étaient pas des condamnations catholiques, tout comme ses soutiens aux dictateurs, criminels, avorteurs et pervers de toutes sortes ne représentaient pas une approbation catholique.

Être la cible des invectives de Bergoglio est donc une source de fierté, et les catholiques américains l’ont très bien compris, votant pour Trump malgré la propagande des jésuites, de l’USCCB et des ONG autoproclamées « catholiques ».

**Steve Bannon :**

Quelle est la meilleure façon de gérer la crise actuelle dans l’Église catholique créée par le régime tumultueux de douze ans de Jorge Bergoglio ?

Compte tenu du prochain conclave papal, quelles mesures les cardinaux-électeurs devraient-ils prendre pour éviter de répéter le régime de Bergoglio ? Craignez-vous que la Mafia de Saint-Gall 2.0 manipule le conclave pour élire un candidat qui poursuivra la destruction synodale radicale de l’Église catholique ?

**Archevêque Viganò :**

Ce que Bergoglio et ses complices ont réussi à faire au cours des douze dernières années constitue un désastre d’une ampleur immense, même si la destruction de l’édifice catholique a commencé bien avant. Bergoglio a porté les principes de Vatican II à leurs conséquences extrêmes : sa « synodalité » est la version actualisée du principe subversif de la « collégialité épiscopale » de Lumen Gentium de Vatican II.

Pour cette raison, Bergoglio s’est toujours considéré fièrement comme un fidèle exécuteur du Concile, car celui-ci – comme Bergoglio – a réussi à s’imposer « par des moyens pastoraux », c’est-à-dire précisément au moment où il se déclarait non dogmatiquement contraignant pour les fidèles catholiques.

Le plus grand dommage causé par Bergoglio a été à travers les nominations qu’il a faites : l’ensemble de la Curie romaine et les conférences épiscopales sont maintenant infestées de ses courtisans, protégés par le clan McCarrick et les jésuites.

Ce lobby subversif a jeté le masque, et cela a ouvert les yeux de nombreuses personnes qui ne sont plus disposées à ratifier les décisions d’une autorité qui ne répond ni à Dieu ni au corps ecclésial.

Pour résoudre la crise actuelle, il est d’abord nécessaire d’enquêter sur les interférences survenues lors du conclave de 2013, afin de déterminer si l’élection de Bergoglio a été manipulée par l’État profond américain et la Mafia de Saint-Gall.

Si cela s’est effectivement produit, alors Bergoglio n’a jamais été valablement élu pape, et par conséquent, le nombre actuel de 136 cardinaux-électeurs (un nombre supérieur aux règles régissant le conclave) tomberait à 28, c’est-à-dire uniquement les cardinaux créés par Jean-Paul II et Benoît XVI.

Si le conclave pouvait retrouver sa légitimité canonique de cette manière, cela donnerait une plus grande autorité à l’homme qu’il élit comme pape, qui ne serait plus grevé par des doutes sur sa nomination.

Tant que les ombres jetées sur la légitimité de Bergoglio ne seront pas dissipées, le conclave verra son autorité compromise.

**Steve Bannon :**

À votre avis, quelle est la plus grande menace à laquelle les États-Unis sont confrontés aujourd’hui ?

**Archevêque Viganò :**

La menace la plus grave qui pèse sur les États-Unis d’Amérique est le danger de ne pas tirer les leçons de ce qui s’est passé jusqu’à présent : que les citoyens ne réalisent pas le danger auquel ils ont échappé en élisant Donald Trump plutôt que Kamala Harris, et que le gouvernement se laisse intimider par les lobbies internationaux et adoucisse les réformes essentielles, à commencer par la limitation du pouvoir excessif des multinationales, en particulier à l’égard des citoyens.

Il ne suffit pas de combattre les manifestations les plus extrêmes de l’idéologie woke. Nous devons reconstruire, en partant des fondations de la famille, du socle de la moralité, de la religion et de la culture.

Nous devons relancer un modèle social à échelle humaine, en accord avec le plan de Dieu et la Loi de l’Évangile.

Et nous devons enseigner à nos enfants à se battre et à mourir pour les droits de Dieu plutôt que pour les prétendus « droits de l’homme ».

Nous devons apprendre qu’il est insensé pour l’homme de vouloir se faire dieu, alors que Dieu s’est déjà fait homme et s’est offert pour nous.

Seule une nation qui se reconnaît sous Dieu peut espérer prospérer, car tout ce dont elle a besoin vient de Dieu, et le Seigneur bénit toujours ceux qui le craignent et le servent.

Source : https://www.thegatewaypundit.com/2025/05/war-room-steve-bannons-interview-archbishop-carlo-maria/

Monseigneur de Ségur : une voix d’éloquence et de foi face à la modernité.

Monseigneur Louis-Gaston de Ségur (1820-1881) est un phare de clarté spirituelle et intellectuelle.
Évêque et écrivain, Monseigneur de Ségur a marqué le XIXe siècle par sa défense ardente de la foi chrétienne et par son éloquence qui alliait profondeur théologique et simplicité.
Il a su, avec une plume vibrante et une conviction inébranlable, rappeler l’importance des valeurs éternelles face aux dérives d’un monde en mutation.
Cet article se propose d’explorer ses concepts clés avec des citations marquantes.

Une vie au service de la vérité et de la foi.

Monseigneur de Ségur, né dans une famille aristocratique française, a consacré sa vie à la défense de la foi dans un contexte de bouleversements idéologiques.
Aveugle dès l’âge de 35 ans, il n’en a pas moins poursuivi son apostolat avec une ferveur remarquable, écrivant des ouvrages accessibles aux fidèles comme aux sceptiques.
Ses écrits, marqués par une clarté et une passion communicative, visaient à réconcilier les âmes avec la vérité chrétienne, face à l’essor du positivisme et des idéologies révolutionnaires.

Comme il l’affirmait avec force : «Combattre la révolution est un acte de foi, un devoir religieux au premier chef.
C’est de plus un acte de bon citoyen et d’honnête homme ; car c’est défendre la patrie et la famille.»
Cette citation, tirée de ses écrits, révèle la profondeur de son engagement : pour lui, la foi n’est pas une abstraction, mais une force vive qui doit irriguer la société entière, de la cellule familiale à l’ordre public.
Ségur voyait dans la révolution – qu’il s’agisse de celle de 1789 ou des mouvements ultérieurs – une rupture avec l’ordre divin, une tentative de substituer à la vérité éternelle des idéologies humaines éphémères.

Les concepts fondamentaux de Monseigneur de Ségur.

1. La primauté de la foi face à la modernité.

Ségur s’est élevé contre l’idée que la modernité devait nécessairement s’opposer à la foi.
Pour lui, le progrès véritable ne peut se concevoir sans ancrage spirituel.
Il dénonçait avec vigueur l’illusion d’un monde qui, sous prétexte de rationalité, rejetait la transcendance au profit d’un matérialisme stérile.

Il percevait la modernité comme un défi spirituel, où l’Église devait non pas s’isoler, mais s’engager à dialoguer avec le monde sans compromettre ses principes.
Cette tension entre ouverture et fidélité est au cœur de son œuvre.
Contrairement à ceux qui voyaient dans toute ouverture une compromission, Ségur prônait une Église vivante, capable de répondre aux défis spirituels de son temps tout en restant ancrée dans la tradition.

2. La défense de la famille et de la patrie.

Pour Monseigneur de Ségur, la famille et la patrie formaient les piliers d’une société ordonnée selon les desseins divins.
Dans un siècle marqué par les bouleversements sociaux et les idéologies collectivistes, il rappelait que la famille est le premier rempart contre la désagrégation morale.
«La famille est le sanctuaire où l’âme humaine s’éveille à Dieu», écrivait-il, soulignant que l’éducation chrétienne des enfants est la clé pour préserver une société juste et harmonieuse.

Sa vision de la patrie, quant à elle, n’était pas un nationalisme étroit, mais une conception spirituelle où la nation est un espace où s’incarne la vocation divine des peuples.
En défendant la patrie, Ségur ne prônait pas la guerre ou l’exclusion, mais la préservation d’un ordre social où la foi guide les institutions.
Cette idée résonne dans sa célèbre formule : «C’est défendre la patrie et la famille», où il lie indissociablement l’amour de Dieu à l’amour des siens et de son pays.

3. L’éloquence comme arme spirituelle.

L’éloquence de Ségur n’était pas seulement un talent littéraire ; elle était une arme au service de la vérité.
Inspiré par des figures comme Blaise Pascal, dont il admirait la capacité à conjuguer rigueur intellectuelle et ferveur spirituelle, Ségur écrivait avec une simplicité qui touchait les cœurs tout en défiant les esprits.
Comme le souligne un commentaire sur ses œuvres, «la verve d’une ironie éloquente, des principes d’éternelle morale, la dialectique d’un bon sens convaincu» caractérisent son style.
(https://obtic.huma-num.fr/obvil-web/corpus/ecole/merlet_extraits-cours-superieurs-et-moyens-prose-et-poesie_1872)

Sa capacité à rendre la foi accessible sans la diluer est l’une de ses grandes forces. Dans ses ouvrages comme “Les Vérités populaires” ou “La Révolution”, il s’adressait autant aux érudits qu’aux simples fidèles, usant d’images et d’analogies tirées de la vie quotidienne pour illustrer des vérités profondes.

«Une étable, une crèche, un bœuf et un âne ! Quel palais, bon Dieu, et quel équipage !» écrivait-il à propos de la naissance du Christ, soulignant l’humilité divine comme un modèle pour l’humanité. Cette capacité à rendre le sacré tangible est au cœur de son éloquence.
(https://obtic.huma-num.fr/obvil-web/corpus/ecole/merlet_extraits-cours-superieurs-et-moyens-prose-et-poesie_1872)

Une pensée intemporelle face aux crises contemporaines.

L’héritage de Monseigneur de Ségur reste d’une actualité brûlante.
Il met en garde contre les idées qui cherchent à uniformiser les consciences et à éradiquer la foi.

Ségur nous invite à une rébellion intérieure, non pas violente, mais spirituelle : celle de l’âme qui refuse de se plier aux diktats d’une modernité désincarnée.
Cette liberté, pour Ségur, passe par un retour à la foi, à la famille et à la patrie, non comme des concepts figés, mais comme des réalités vivantes, enracinées dans la vérité divine.

Conclusion : un appel à la résistance spirituelle.

Monseigneur de Ségur, par sa vie et son œuvre, incarne une résistance à la fois douce et inflexible face aux assauts de la modernité.
Sa foi ardente, son éloquence vibrante et sa vision d’une société ordonnée par des principes chrétiens continuent d’inspirer ceux qui cherchent un sens dans un monde en crise.
Comme il l’écrivait, «cet enfant [le Christ] fit taire les oracles, avant de commencer à parler», nous rappelant que la vérité, même dans sa simplicité, a le pouvoir de renverser les idoles.
(https://obtic.huma-num.fr/obvil-web/corpus/ecole/merlet_extraits-cours-superieurs-et-moyens-prose-et-poesie_1872)

Dans un monde où les «mots du silence» – ceux qui parlent au cœur et à l’âme – se font rares, Ségur nous exhorte à écouter la voix de la foi, à défendre la famille et la patrie, et à cultiver une éloquence qui ne soit pas vaine, mais porteuse de vérité.

À nous, aujourd’hui, de relever ce défi, en nous inspirant de son exemple pour construire un avenir où la liberté intérieure triomphe des tyrannies modernes.